❝ The illiterate prince and the dyslexic professor ❞ (FT. Clément)

(Serre Botanique - 13/09/1971)

(Serre Botanique - 13/09/1971)

Une voix d'adulte le fait sursauter en faisant refermer son livre à toute hâte. Il était pourtant sûr de ne croiser personne à cette heure-ci, son cœur bat rapidement dans sa poitrine sans pourtant se lever de sa cachette. Il ne reconnait pas la voix de cet homme qui venait s’accroupir devant lui, par réflexe, il se recule un peu, bien qu’il ne puisse aller plus loin. Le serpentard fronça les sourcils, il ne l’aime déjà pas et pour cause, il a le physique de James Potter en version adulte. Les lunettes rondes, des cheveux bruns (mais bien coiffé), des yeux noisette et ce visage qui lui ressemble vaguement. Arbitrairement, il le déteste déjà, il refuse toute conversation avec ce professeur à la tronche de Potter, ça doit être un oncle ou un cousin, la ressemblance n’en est que troublante. « Néanmoins, ce n'est pas le livre le plus facile pour commencer. » Son cœur loupe un battement, il a clairement entendu ses difficultés de lecture et il en rougit de honte. Posant le livre à côté de lui, ramenant ses jambes contre lui, il bougonne quelque chose d’inaudible avant de détourner le regard.  Par gêne, il triture les lacets de sa chaussure droite, toujours en évitant de le regarder, rongé par la honte, illettré à onze ans, la honte.

L’homme en question décline son identité, il l'aperçoit mieux à présent sous les lumières artificielles de la serre : c’est le professeur d'arithmancie. Un cours qu’il voudra volontiers suivre dans deux ans. Pour l’instant, s’il veut apprendre à bien compter, il doit passer par la case d’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Il se détend un petit peu, ce n’est pas un Potter, bien qu’il en ait la ressemblance physique. Ce professeur dégage une douceur particulière qui lui semble si étrangère, aucun adulte ne prend le temps de se mettre à son niveau et de lui parler gentiment comme le fait Monsieur Trinder. En tout cas, ce stratagème d’approche docile fonctionne très bien sur le petit Serpentard qui n’a reçu aucune once de tendresse dans son enfance. « Severus Snape. » Dit-il doucement, les joues rouges.

Dans cette douceur d’une complicité qui est en train lentement d’éclore entre eux, il se livre à la confidence tel un enfant qui laisse une chance à faire confiance à cet inconnu. « Ne le dites à personne que je ne sais pas lire, ni écrire, s’il vous plaît. » Severus plonge sa tête entre ses bras, il déteste de montrer ses faiblesses, ses lacunes, maintenant que le professeur matheux sait de son problème d’illettrisme, il voudrait surement savoir pourquoi un enfant de onze ans ne sait pas lire ni écrire. « J’étais très souvent malade enfant, je n'étais pas souvent à l’école, pour ainsi dire, jamais et mes parents travaillaient jusqu’à tard le soir. » Mensonge total. Solution de facilité de dire d’être malade et d’avoir des parents absents, mais ce qu’il lui a passé par la tête à l’instant même.

(Serre Botanique - 13/09/1971)

C’était quand la dernière fois qu’un adulte lui a dit ce genre de mots ultra-réconfortant ; « Je sais que c'est compliqué. Je ne dirais rien, c'est promis. » ? C’était quand la dernière fois qu’un adulte l’écoute véritablement ses besoins ? Severus hésite de longues secondes avant de faire un petit hochement de tête et de faire un petit sourire au coin, ravi qu’on le considère avec respect, peu d’adulte prend au sérieux les enfants. Son côté méfiant doute de la véracité de son histoire, il n’était pas -encore- legilimacien mais les yeux de ce professeur ne peut pas lui tromper, il avait l’air sincère. Mieux que cela, ce professeur lui propose de façon subtile de lui enseigner la lecture et l’écriture après les cours, il ne pouvait pas rêver mieux. Lily se poserait des questions au bout d’un moment, hors de question de passer pour un faible à ses yeux. Après tout, c’est lui le professeur de Lily en matière de monde magique, un professeur illettré ne serait pas crédible aux doux yeux de sa belle. « D’accord, je viendrai pour demain soir. » Il est piqué par la curiosité de sa bibliothèque, déjà celui de Poudlard est immense, il a hâte de savoir bien lire pour les feuilletés un à un, pour absorber de la connaissance, car la connaissance est synonyme de pouvoir, et ça, Severus l'a déjà compris. Ce monde est rempli de danger et il fera tout pour protéger Lily sans savoir qu’un jour ses objectifs vont dévier sur une autre perspective de la vie bien plus sombre, ayant pris goût à ce que la magie noire peut lui offrir.

Il se demande, enfin, que fait un professeur d’arithmancie dans une serre tard le soir, tout comme lui, serait-il un amoureux des plantes ? Le garçon préfère largement les potions, une activité qu’il aime faire avec sa mère, mais le savoir des plantes et des fleurs doit être indispensable pour une réussite optimale de la potion. « Vous aimez les plantes ? J’ai vu que vous avez récolté des roses de lune, ce qui est assez difficile à faire pousser dans une serre, elles ont besoin de la lumière de la lune pour qu’elles reçoivent toutes les propriétés bénéfiques. C’est ce que j’ai entendu dire… » Sa mère possède des livres hallucinantes de plantes que ce soit moldus ou sorciers, il suppose même que ce n’est que la surface immergée de l’iceberg et qu’elle doit en avoir pleins d’autres dans sa maison d’enfance chez les Prince. Dotant plus, Severus a pris l’habitude de questionner sa mère quand elle préparait des petits remèdes quand il était malade, et ce que dans ses moments là que sa mère prenait le temps de lui parler et d’expliquer les plantes. Eileen Snape a transmis à son fils son amour des plantes et qu’il peut aisément discuter avec ce professeur amateur de botanique. « Les plantes ont des histoires à raconter, elles sont subtiles, discrètes et silencieuses, mais une fois qu’on comprend son message, elles peuvent nous révéler des secrets fascinants. Si on connait toutes les facettes des plantes et des fleurs, c’est là, le secret des potions réussites, même pour les potions les plus durs à réaliser, vous ne trouvez pas ? » Par contre, les prendre de haut, de les utiliser de manière inconsciente peut aussi se révéler dangereux voir entrainer la mort. La Belladone en est un parfait exemple, si elle est bien préparée et qu’on extrait minutieusement la baie empoissonnée, elle est excellente dans les potions pour un décontractant musculaire et contre les douleurs intestinales. Perdue dans ses réflexions, une habitude qu’il doit perdre afin de ne pas paraître trop bizarre devant lui et qu’il voudrait plus s’attarder à un cas étrange comme lui, dans le futur, les experts diront qu’il est asperger ou un tdah mais dans les années 70, il est bizarre pour le commun des mortels. « Les plantes, les potions et les sortilèges sont mes passions, j’espère que la lecture le deviendra également. »

(Serre Botanique - 13/09/1971)

Il ne faisait pas pousser des roses de lunes ici, mais chez lui, c'était encore mieux qui l'avait espéré. Un passionné doit forcément un jardin et un intérieur de plantes, et ceux qui chérissent les plantes, sont pour lui des bonnes personnes intelligentes et qui comprenne la subtilité des choses simples.

La citation du professeur était belle, elle raisonnait dans son esprit pour s'y installer petit à petit dans son cœur, il ne l'oubliera pas. Il le dira dans un futur proche à celui qui considère son pire ennemi, et des années plus tard à ses élèves, mais on était encore loin du futur sombre et noir qui l'attend. Severus regarda le professeur avec une attention bien particulière, ses yeux obsidiennes qui le fixe, les oreilles grandes ouvertes. Il affiche un sourire, un grand sourire que rares gens ont le privilège de voir sur son visage d'enfant trop triste, déjà trop aigri de la vie. Il ne connait pas très bien le langage des fleurs, c'était encore une zone inconnue qu'il avait hâte d'explorer, d'apprendre davantage pour mieux utiliser pour les potions.

Quand il se redressa pour se relever, Severus en fait de même en saisissant la main du professeur. Son livre d'histoire de la Magie n'avait plus aucun intérêt, il avait une meilleure encyclopédie de la vie devant lui. Il avait hâte et soif d'apprendre à lire, il ressentait une excitation et une impatience digne d'un enfant qui va pour la première fois au parc d'attraction.

« J'ai hâte d'être à demain soir, je ne pense pas réussir à rester concentré toute la journée ! » Dit-il avec un sourire amusé, les joues un peu rouges.

En effet, la journée du lendemain, il avait du mal à se concentrer, il n'écrivait même pas les leçons, après tout, ce professeur Trinder allait tout apprendre. Il n'avait pas pris conscient que son problème n'allait pas se régler en une seule soirée, mais plusieurs semaines, voir plusieurs mois, même. Il n'avait pas brillé en cours d'Histoire, il a été distrait en cours de sortilège, il avait rapidement mangé son repas de midi. Dans l'après-midi, non plus, il ne fut pas brillant, en cours de vol son balai se ruait comme un cheval auquel il essaya de chevaucher sous les éclats de rire de Lily pour l'amuser, il était de bonne humeur. Le soir venu, après aussi avoir rapidement manger son repas, il se hâta dans le couloir dans lequel se trouve la salle d’arithmancie, il est un peu en retard en se perdant dans les couloirs, les escaliers et les salles de cet immense château, sans compter que Peeves s’était amusé de lui indiquer le mauvais endroit ce qui lui a valu de faire un long détour.

« Bonsoir professeur Trinder, pardonnez-moi de mon retard... »

Il tient contre lui quelques parchemins vierges et une vieille plume bien utilisée, une des plumes qui avait appartenu à sa mère quand elle était encore à Poudlard. Il s'installa dans un des bureaux au premier rang, il était impatient de pouvoir s'exercer.

(Serre Botanique - 13/09/1971)

C'était la première fois que Severus rentrait dans cette salle de classe, qui lui donne un avant-goût pour sa troisième année. Même si la salle était assez obscure, il n'en restait pas moins très chaleureuse, les plantes donnait vie à cette pièce austère ainsi qu'une bonne odeur de la flore qui invite à la concentration facile lors d'un exercice fastidieux et appel au calme et à la détente. Le garçon était intrigué par cette plante, il n'en avait vu et ne connaissait pas encore son nom, mais chaque chose en son temps, il était là pour apprendre et il lui était reconnaissant que ce professeur prend de son temps libre pour lui.

Quand le professeur l'invita à rentrer, il s'avança avec une impatience non dissimulée, il n'était pas encore assez mature pour gérer au mieux ses émotions. Une douce musique en français s'arrêta, il reconnaissait cette langue pour l'avoir un peu entendu, il y a beaucoup de Français qui visite Londres et ses alentours et que sa maman lui avait affirmés qu'ils avaient des origines française lointaine. Comme bon élève qu'il était, il s'assit au premier rang et installe son petit matériel pendant que Trinder s'occupait à chercher les manuels.

« Je vais bien, j'ai beaucoup aimé cette première semaine de cours. Les cours de potions sont un peu trop faciles, je ne m'attendais pas à ce qu'on fasse des potions contre les furoncles... Je pensais que tout le monde savait le faire... J'étais avec Lily, ma meilleure amie, elle est douée pour une première fois, c'est une née-moldue par contre Potter.. » Il se crispe un peu, sa journée a été gâchée à cause de lui. Il doit, d'ailleurs, trouver quelque chose pour l'humilier comme il a humilié en cours de métamorphose. «... Non, rien. »

Son humeur maussade ne fut qu'un bref instant quand le professeur lui demanda s'il souhaitait commencer. Bien sûr, et deux fois qu'une ! Il affiche un grand sourire, ce genre de sourire trop précieux et trop rare sur un enfant qui a déjà vécu trop de choses sur épaules d'enfant.

« Oui ! »