Juger un bonbon sur son emballage - ft. Loëlyne

Mon petit Clem,

Etant donné que je suis une femme de parole, voici les livres que tu m'as demandé.
Je ne suis personne pour juger tes goûts littéraires, mais je dois avouer que cela me surprend. Te connaissant, j'aurai pensé que tu souhaitais un énième ouvrage sur les plantes tropicales ou un grimoire ennuyant sur les chiffres et leurs symboles.
En tout cas, bonne lecture.

N'oublie pas de m'écrire,


Colis sous le bras, Clement replie la carte parfumée qui accompagnait son courrier et la glisse dans la poche intérieure de son manteau bleu nuit. Sa tante en fait toujours trop, mais depuis le temps, il s'est habitué à sa fantaisie - et à ses surnoms mieilleux.

Alors qu'il s'avance pour quitter le bureau de poste, Clement reconnait la silhouette familière de la jeune professeure de littérature, Miss Loëlyne Halliwell. Comment ne pas la reconnaître ? C'est le genre de femme étrange, pas désagréable à regarder, mais impossible à lire car trop sérieuse et cachotière. Le genre de femme intrigante, dont le silence et le constant contrôle de toutes choses révèlent la présence de secrets bien enfouis... Et Clement adore les secrets. Il regarde à droite, à gauche : elle semble seule. Par chance, elle ne l'a pas encore remarqué et franchit la porte de chez Honeydukes. Clement a un sourire en coin, on dirait bien que la directrice des Gryffondor est une gourmande. Encore un point commun.

Après un léger temps d'hésitation, il traverse la route pour la rejoindre.

Passant l'entrée de la boutique de sucreries, l'autoproclamé maître des nombres se souvient d'un détail important, d'une chose qui avait titillé sa curiosité lorsqu'il était allé à la bibliothèque quelques jours auparavant. Non, pas une chose, mais une personne. En cette rentrée scolaire, il n'y avait pas que de nouveaux élèves ; de nouveaux membres du personnel avait investi le château... Et le visage de la bibliothécaire l'avait troublé.

Clement n'est pas de ceux qui croient aux coïncidences. Enfant, il s'en étonnait et s'en amusait, mais en grandissant, il a bien vite compris que les jeux du sort n'étaient que le fruit de probabilités et de logique. Le monde avait perdu de sa magie lorsque le petit garçon avait apprit à calculer les chances et les probabilités.

Il flâne un instant dans les rayons de la boutique, entre les caisses de choco-grenouilles et les tonneaux de dragées surprises. Comment s'appelle-t-elle, déjà ? Son regard détaille le mur dédié aux bonbons "à effets spéciaux". Ah, oui, Ocelyane. Un étrange prénom, lui aussi.

Pour combler sa gourmandise et son âme d'enfant (Aily ne lui avait-elle pas conseillé de l'entretenir ?) il pioche deux ou trois choco-grenouilles. Mais son esprit est ailleurs, la femme qu'il a croisé à la bibliothèque occupe ses pensées. Il n'est pas question d'un coup de foudre, le cœur du maître des nombres est dévoué à une autre, mais une curiosité aussi grandissante que mal placée est née lorsqu'il a réalisé que Loëlyne et Ocelyane se ressemblaient un peu trop pour que cela soit dû au hasard.

Peut-être qu'il se trompait - cela l'embêterait - mais il lui fallait résoudre ce mystère.

Il cherche sa cible des yeux. Quand il la repère, il s'avance tel un prédateur vers sa proie, ramassant au passage une bonne poignée de baguettes à la réglisse - monsieur est gourmant. Au détour d'un rayonnage, comme par hasard, il se retrouve nez à nez avec sa collègue. Il s'arrête de justesse pour ne pas la bousculer et relève les yeux vers elle.

« Miss Halliwell ! » Un fin sourire trop poli étire ses lèvres. « Quel surprise que de vous voir ici. »

Quelle coïncidence, surtout.