En bonne compagnie - ft. Rose

Voilà plus d'un mois qu'ils étaient de retour à Poudlard, un mois qu'ils avaient repris leurs marques et leurs habitudes. Les cours s'enchaînaient et ne se ressemblaient heureusement pas. Chaque jour était une occasion d'apprendre et de s'améliorer, chaque jour était beau et aurait dû le rester.

Voilà plus d'un mois qu'ils étaient là, et Thomas n'avait pas l'impression d'avancer. A vrai dire, lui qui avait toujours vécu au jour le jour dans un cadre solide et familier ne s'avait pas où aller. Tout ce qu'il pensait connaitre n'était plus. Voyager dans le passé était amusant, au début, mais à présent, cela l'angoissait. Leur secrète entreprise n'avançait pas, les regards curieux et intrigués de ses camarades de classe le mettait mal à l'aise et certaines questions de ses professeurs l'embarrassaient. Sa motivation demeurait forte dans son cœur mais, parfois, comme la flamme d'une bougie, il lui arrivait de vaciller. Et Thomas craignait qu'elle ne s'éteigne.

Bien évidemment - et malgré sa fâcheuse tendance à vouloir porter tout seul son fardeau et celui des autres - Thomas savait qu'il pouvait compter sur ses amis Rose et Scorpius, sur sa chère cousine Philomène... Mais, et peut-être était-ce égoïste de penser ainsi, il lui manquait le plus important.

La plaie dans son cœur ne guérissait pas.

Un soupir lui échappa et il prit une grande inspiration pour se ressaisir. Ce n'était pas le moment de faiblir, surtout pas en compagnie de Rose ! Le fils Dubois jeta un coup d'œil vers la jeune fille qui avait bien voulu délaisser ses meilleurs amis pour l'accompagner à Pré-au-Lard. Alors qu'ils atteignaient les premières maisons et boutiques, Thomas décida de briser le silence.

« Je suis content que tu sois venue avec moi ! » Il offrit un sourire à son amie pour ponctuer sa phrase, avant de reporter son attention droit devant lui. « J'avais besoin de sortir un peu. »

Thomas ne tenait jamais en place, Rose qui le connaissait depuis plusieurs années déjà devait le savoir. Et puis, ils se ressemblaient et se comprenaient sur de nombreux points. Dans son for intérieur, Thomas remercia sa chère directrice pour la présence de Rose durant ce voyage en 1976.

Son regard se perdit sur les devantures qui n'avaient pas beaucoup changé en quarante-six ans et il détailla avec curiosité les enseignes qui s'offraient à eux. En ce doux après-midi d'octobre, les rues de Pré-au-Lard s'éveillait. Quelques passants et élèves flânaient dans les rues, la lueur orange des lanternes dans les vitrines attiraient les regards les plus curieux. Il y avait trop de boutiques à voir et à visiter, Thomas se retrouvait bien incapable de faire un choix.

« Il y a un endroit où tu aimerais aller en priorité ? »

Thomas Dubois. Une énigme pour la jeune adolescente en fleur qu’était Rose Weasley. Pourquoi n’arrivait-elle pas à se dire qu’il était le jeune homme approprié pour elle? Pourquoi son coeur s’évertuait à battre pour Scorpius? Après tout, Thomas c’était son ami depuis quelques années déjà, un très gentil garçons selon sa mère. Et puis, on ne pouvait le cacher, il était beau. Elle avait vu les filles qui tentaient de lui faire du charme. Pourquoi elle n’arrivait pas?

Mais aujourd’hui, elle avait étrangement dit oui. Elle avait laissé son trio habituel, malgré le regard déçu de Scorpius, pour rejoindre son ami dans cette sortie du week-end. Emmitouflé dans son manteau et son écharpe aux couleurs de serdaigle, la rousse marchait à travers ce mois d’octobre encore assez doux. Soudainement, la voix de Thomas brisa le silence de cette marche assez complentative.

- Oh euh..bah moi aussi je suis contente d’être avec toi. Vu qu’on se voit déjà pas assez…Je veux dire j’adore la compagnie d’Albus et Scorpius, mais c’est différent d’être avec toi.

Elle lui adressa un petit sourire à son tour, avant de perdre son regard sur pré-au-lard. C’était quand même étonnant de se dire que depuis l’époque de sa grand-mère, rien n’avait vraiment changé. Elle imaginait bien Molly se balader et faire les boutiques. Elle ne l’avait pas encore croiser pour l’instant ou plutôt elle ne voulait pas la croiser. Après tout, ce sera tout de même un choc de voir sa mamie adorée avoir…son âge.

La question de Thomas résonna dans le vide un moment, avant que Rosie ne reprenne la conversation.

- Mh, peut-être à Fleury & Botts. C’est là que je passe la plupart de mon temps. Et il y a un livre que je cherche depuis un moment. Après on pourrait aller se boire une bierreaubeurre aux trois balais? Enfin à moins que tu veuilles aller autre part?

Elle était légèrement nerveuse. Les regards des filles sur elle la rendait dans cet état. Mais bon sang, c’était Thomas! Elle le fréquentait souvent dans leur temporalité. Ils avaient démarrés le quidditch ensemble par Merlin! Alors pourquoi cela devrait changer dans une temporalité ancienne?

Rose, Albus et Scorpius, en voilà un trio de rêve, une amitié solide et qui semblait ne faiblir devant rien ni personne. Thomas n'avait rien à leur envier, il avait sa propre bande et ses meilleurs amis, mais la différence cruciale était que ses BFF à lui étaient restés en 2022.

En général, il évitait d'y penser, tout comme il éviter de penser à sa mère seule à Holyhead, ou à son père et sa sœur... En général, il arrivait à ne pas y penser. Il était assez hyperactif pour que son esprit soit continuellement occupé et, s'il ne voulait pas réfléchir, il courait partout ou jouait au Quidditch. Mais on ne peut pas fuir éternellement. La nuit était un calvaire qu'il redoutait et la nuit dernière, il avait réalisé quelque chose d'important. Il avait besoin de voir du vrai monde, des gens importants pour lui. Voilà pourquoi être avec Rose lui faisait tant plaisir.

« C'est très gentil à toi d'avoir accepté ma compagnie, alors. » Il poncuta sa phrase d'un nouveau sourire, mais ce sourire-là se fit rapidement plus moqueur et une petite lueur taquine brilla dans ses yeux avant que Thomas n'aille au bout de sa bêtise. « Enfin ! J'espère qu'ils ne seront pas trop jaloux de savoir que tu traînes avec un type aussi cool que moi. »

A défaut d'avoir les cheveux assez long pour un hairflip digne des meilleurs pub L'Oréal, Thomas jeta le bout de son écharpe rouge et or par dessus son épaule. Mais impossible pour lui de rester sérieux trop longtemps, sa propre idiotie le fit rire.

C'était Scorpius qui le trouvait cool, surtout. Thomas était assez confiant dans ses capacités pour connaitre ses qualités et ses défauts, mais cool, il ne pensait pas l'être. C'était trop subjectif, chacun pouvait avoir son avis là-dessus. Alors que Rose observait les alentours, perdue dans ses pensées, Thomas s'égara dans les siennes et se demanda si, elle, elle le trouvait cool. Il la détailla sans s'en rendre vraiment compte, comme s'il ne l'avait jamais vu avant, surpris par l'étrangeté de ses propres questionnements... Il détourna les yeux en entendant un groupe de trois demoiselles de quatrième ou cinquième année glousser en passant à côté 'eux. Il leur adressa un signe de la main et un sourire, ce qui attisa leurs gloussements et leur fit presser le pas. Qu'est-ce que c'est étrange, une fille !

Il haussa les épaules, à des kilomètres de s'imaginer les pensées de sa camarades et rivale. Il reporta son attention sur Rose quand sa voix résonna à nouveau et il approuva ses propositions d'un signe de la tête.

« Non, non, Fleury & Botts et une bière au beurre, c'est un programme qui me convient. » Aussitôt dit, aussitôt fait, le jeune Gryffondor prit la direction du libraire avec le sourire. C'est au bout de quelques pas que lui vint une autre idée. « Quoi que ! J’aimerai bien faire un tour à Scribenpenne ! Il me faut du papier à lettre et ils en font de très jolis ! Amelia les adore, à chaque fois qu'on s'écrit, on cherche toujours les plus originaux. »

Parler de sa sœur au passé, il n'osait pas. Il ne pouvait pas. Cela lui faisait trop mal au cœur.

Se détacher de ses habitudes, sortir des sentiers battus. Voilà ce qu’elle faisait avec Thomas. Il lui faisait du bien, penser à autre chose et surtout leurs débats autour du quidditch la faisaient rire. Mais oui, les flèches d’appleby étaient fortes en tactique, mais nulles en vitesse… Bien sûr.

Mais là, le sujet n’était point le quidditch. C’était juste…eux. Une main passa dans les cheveux de la rousse, tandis que Thomas plaisantait.

- Prends pas la grosse tête, Thomy. C’est toi qui a de la chance de trainer avec moi, dit elle d’un ton tout aussi moqueur, avant de rire à son tour.

Perdue dans ses pensées, elle observa les alentours sans soucier ou presque du reste. Ils évoquèrent finalement le programme de la journée et Thomas accepta. Un nouveau sourire débarqua sur ses lèvres. Oui, un bon bouquin cela la détendrait. La réflexion de son partenaire, lui fit pourtant perdre un peu son sourire.

- Avec plaisir. On a qu’à faire un tour juste après.

Elle comprenait le déni de Thomas. Elle aussi aurait aimé raconter à ses parents ce qui se passait.Et à Oncle Georges que ses coups étaient de plus en plus précis. Et à Oncle Percy qu’elle avait eu un optimal en DFCm et à Tante Fleur qu’elle avait trouvé une jolie robe et…

Elle poussa un soupir intérieur. Oui, sa famille lui manquait même si certains de ses cousins étaient dans les parages. Mais elle avait une mission. Une super mission et c’est pour ça qu’elle et Thomas étaient ici.

Une fois à Fleury & Botts, la jeune femme prit une grande inspiration, appréciant l’odeur des livres.

- Bienvenue à la maison, dit-elle avec un sourire.

Ils firent le tour, Rose empilant les livres entre ses bras. Puis elle fit un petit tri une fois le tour fini, avant d’en sélectionner quatre. Payant avec quelques gallions, ils finirent par sortir pour rejoindre ensuite Scribenpenne.

- Et si on trouvait un beau papier à lettres pour tes écrits?

Elle se mit à chercher, observant un peu les différents papiers. Quand ils finirent leurs achats, le temps de la bierreaubeurre était venue. Avec leurs achats, ils se rendirent aux trois balais et prirent une table sans autres. La rousse replaça une de ses mèches, avant de reprendre la parole.

- Thomas…Est-ce que t’as déjà pensé à l’éventualité…qu’on soit coincé ici pour toujours?

Le reste de la journée fila et, oui, Thomas devait bien l'admettre : c'était lui qui avait de la chance de traîner avec Rose. Ils se perdirent dans les rayons de Fleury & Botts pendant au moins une heure et même le fiston Dubois qui n'avait rien à acheter sorti de la librairie avec deux livres dans les bras ! Dans la boutique suivante, il sélectionna avec soin le papier qui lui servirait à écrire la lettre pour sa sœur. Il en trouva un aux ridicules motifs de papillons, avec l'enveloppe assortie.

Leurs achats terminés, ils allèrent se poser au Trois-Balais autour d'une bonne bieuraubeurre dans l'optique de conclure la journée en beauté.

La question fatidique de Rose tomba lorsqu'ils furent installés à table. Thomas ne s'y attendait absolument pas et il leva son regard empli de surprise vers son amie. Il l'observa longuement, le temps que l'information lui monte au cerveau et qu'il prenne une décision. Oui, il hésita entre son éternelle franchise et un mensonge édulcoré qui lui ferait miroité un futur glorieux et rassurant. Il hésita, et finalement, il opta pour la vérité.

« J'y ai pensé... » Il déglutit. « Et j'ai pensé à des trucs encore pire. »

Il étouffa un rire, mais c'était nerveux. Il connaissait les films et les séries de voyage dans le temps, sa préférée en parlait tout le temps. Il avait eu le temps d'y réfléchir des centaines et des centaines de fois depuis qu'ils étaient là. Jamais il ne s'était confié à propos de ses doutes et ses craintes. Peut-être était-ce le moment ? Il pouvait avoir confiance en Rose, elle ne le jugerait pas. Il baissa d'un ton pour ne pas être entendu.

« Ma théorie... C'est qu'au final, on ne va rien changer. Enfin... Oui, mais non. » Incapable de parler sans s'agiter, il triturait le verre de bieraubeurre entre ses doigts. Au fond, il se révélait nerveux à l'idée d'exposer ce qui le hantait. « Notre arrivée en 1976 aura créé une deuxième branche temporelle ou un autre univers, comme tu préfères, comme il s'en crée toutes les secondes. Nos actes, nos paroles, nos décisions... Ça en créera d'autres. Parmi tous ces "chemins", il y en a où nous réussiront à sauver le monde, d'autres où on échouera et où ça sera pire... Peut-être même qu'il y a tout un univers où on est des Mangemorts et qu'on sème le chaos main dans la main. Mais le nôtre, celui qui conduit à notre futur... On n'y changera rien. »

Un soupire fila entre ses lèvres, mais il poursuivit sa terrifiante théorie. En bon Serdaigle, on sentait qu'il avait bossé le sujet. Peut-être trop. Comme toujours, difficile d'arrêter Thomas Dubois lorsqu'il était lancé.

« Si on va dans le passé et qu'on le change pour empêcher... Pour empêcher tout ce qui est arrivé en 2022, et bien, ça n'arrivera pas en 2022. On est d'accord ? Donc on aura plus de raison de partir. » Il releva les yeux vers elle, ses prunelles baignées d'une infinie tristesse, au moment d'énoncer sa glaciale conclusion. « Donc, si on est là, c'est qu'on a jamais réussi à changer les choses. »

Et qu'il n'a jamais sauvé son père, ni Amelia.

Au final, s'être confié à son amie ne l'avait pas soulagé et le poids qui pesait sur son cœur était toujours présent. Peut-être plus lourd encore. Soudain, il regretta.

« ... Désolé. » Il lui offrit un sourire maladroit, les yeux brillant. « Je suis pas autant pessimiste, d'habitude. »

Pourquoi elle avait commencé par cette question? Elle en savait rien. Peut-être était-ce l’appréhension d’une réalité qui la faisait angoissé depuis le moment où il avait posé pied en 1976? Ou simplement car elle ne voulait pas être la seule à se dire que jamais ils ne reverraient leurs parents? Thomas était son ami, certes. Mais même ce genre de peur, elle n’en avait pas parlé à Albus ou Scorp. Parce que Albus angoissait déjà d’être le fils du héros et Scorpius…ben c0’était Scorpius. Elle devait être le maillon fort des trois. La fille débrouillarde. La courageuse. La lionne. LA…

Et puis Thomas avait commencé à parler…et valider ses peurs. Okay, il allait loin, mais devait-elle lui en vouloir? Elle pensait presque la même chose. Ils allaient disparaitre si un de leurs grands parents disparaissaient. En tout cas, elle, elle risquait de disparaitre. Lui, on avait pas encore trouvé la trace de ses grands-parents. Mais dans l’idée cela restait la même. Elle l’écouta attentivement, mais elle finit par poser sa main sur la sienne. Quand il s’excusa les yeux brillants, Rose posa son regard tout aussi brillant dans le sien.

- J’avoue que ta théorie n’est pas fausse, mais imagine si on arrive à les prévenir plus tôt? Si ils arrivent à s’entrainer assez pour ne pas mourir? Certes, tout change, mais nos proches seront…en sécurité. Comme dirait ma mère «  Je préfère mourir en vous sachant vivant que vivre en vous sachant en danger ». On a pas été envoyé en vain. Et si on doit vivre ici et voir nos parents grandir…ou si on doit disparaitre à jamais…On le fera en sauvant le monde.

Elle lui offrit un sourire qui se voulait convainquant, avant de boire une gorgée de bierreaubeurre.

- En tout cas, la recette est aussi bonne en 1976 qu’en 2022! Tu te souviens toi de ta première bierreaubeurre?

Il fallait changer de sujet. C’était mieux.

Elle ne comprenait pas. Ou, peut-être qu'elle comprenait, mais qu'elle préférait faire comme lui et s'armer d'optimisme et d'espérance pour trouver une solution qui les réconforterait tous les deux. Cela ne suffirait pas à convaincre Thomas, mais une petite part de lui fut touchée par la tentative de son amie et il l'observa avec tendresse. Elle était si gentille, Rose. Pensait-elle vraiment les mots de sa mère ? Mourir en sachant ses proches vivants, plutôt que vivre en les sachant en danger... Rose le ferait-elle ?

Il se demanda soudain si, lui, il aurait sincèrement le courage de faire une chose pareille. Et il se demanda si ce n'était pas un peu égoïste. Mam' ne voudrait pas le voir mourir, Amelia et papa ne l'auraient pas souhaité non plus... Pouvait-il leur faire ça ? Non, bien sûr que non. Il devait revenir vivant. Sinon ça ne servirait à rien.

Revenir vivant... Ou continuer à vivre ici et voir ses parents grandir ; l'idée le terrifia aussitôt. Aussi ironique que cela paraisse, 1976 était l'année que McGonagall avait choisi pour leur mission... Et l'année de naissance de son père. Henry Dubois et son épouse avait quitté Poudlard depuis quelques années déjà et leur vie suivait tranquillement son cours... Monsieur fabriquait des balais dans un patelin des campagnes anglaises, son épouse tenait la boutique et dorlotait le futur capitaine du club de Flaquemare. Hors de question pour Thomas de venir troubler cet ordre parfait, même si la curiosité le taquinait. Le seul risque était de croiser ses grands parents maternels, qui achèveraient cette année ou la prochaine leur cursus scolaire.

Rose changea soudain de sujet, et Thomas la remercia en silence pour ça. Cela n'avait rien de subtile, mais ils s'en contenteraient tous les deux. Il se racla la gorge et trifouilla le fin fond de ses souvenirs.

« Hm... J'avais 4 ou 5 ans, je crois. » Il hocha la tête pour confirmer ses souvenirs avant de se lancer dans un de ses fameux monologues. « C'était l'anniversaire de maman, on avait invité oncle Jimmy, sa femme et mes cousins, Brian et Charlotte. Et je sais plus si c'était une idée d'Amelia ou de Brian, mais ils ont décidé de me donner à bouffer un peu tout ce qu'ils avaient sous la main... Dont le verre de Bieraubeure de tonton Jimmy ! J'ai bu cul-sec, mais j'ai trouvé ça infect. La légende raconte que j'ai tout recraché sur ma sœur ! »

Un rire ponctua son récit et il porta son verre à ses lèvres pour boire un peu. Chose faite, il releva les yeux vers son amie et lui retourna la question.

« Et toi ? »

La bierraubeurre. Boisson crée par hasard selon les légendes, mais délicieuse pour les papilles. Une sensation de réconfort dans des temps compliqués. Une boisson d'amis, de famille, de bonheur. Combien elle en avait pu en boire dans sa temporalité? Des milliers, elle ne le cacherait pas. Rose était une gourmande, comme la plupart des Weasley. En même temps, quand on avait une grand-mère comme Molly...

Elle voulait lui évoquer des bons souvenirs en dehors de cette angoisse marqué par leur mission. Un petit rire s'échappa des lippes de la rousse quand il évoqua la légende. Elle voyait bien le petit Thomas cracher sur sa soeur, cette boisson qui aujourd'hui était agréable à leur palais.

- Moi? C'est aussi une histoire de famille. Oncle Georges et Oncle Harry voulait absolument qu'on goûte notre première bierreaubeurre avant de nous rendre à Poudlard avec Albus. Papa et maman étaient dans un premier temps contre, mais Oncle Harry a rappelé à mon père que cette boisson avait marqué le début de leur amitié. Alors, ils nous ont laissé le soir de noël, avant notre rentrée, gouter cette boisson magique. Sauf que James s'en est mêlé. Il a mis du piment dans celle d'Albus et celui-ci est devenu rouge vif. J'ai failli recracher ma gorgée tellement je ne m'y attendais pas. J'ai donné alors la fin de la mienne à Bus et ça lui a calmé le palais. Aujourd'hui, je goûte toujours ses bières avant!

James Sirius était un bon farceur, surtout envers son frère cadet. Et ça, Rose ne pouvait le nier: sa famille lui manquait, même si nombreux des enfants Weasley étaient actuellement en 1976.

La bière descendante, les anecdotes allaient de bon train. Un moment pour se rappeler leurs familles, mais aussi parler des derniers potins. Oui, elle appréciait vraiment Thomas pour aussi son caractère et ce coté de ne jamais s'ennuyer.

Elle but une dernière gorgée, avant de lui sourire à nouveau, le rouge aux joues.

- Bon, il serait peut-être temps qu'on rentre. Le devoir du cours de DFCM va pas se faire tout seul, non? finit-elle par déclarer en rassemblant ses affaires. En plus, Albus va me faire la tête si je ne l'aide pas. En tout cas, c'était très sympa comme petite sortie, Thomas. Vraiment.

Elle passa une main dans ses cheveux, remettant une mèche derrière son oreille, avant de poser le montant de la note sur la table.

- La bière est pour moi. Ce qui veut dire que tu devras me réinviter bientôt pour une autre! continua-t-elle en riant.

Coude sur la table, poing écrasé sur la joue, Thomas écouta l'histoire de Rose tout en esquissant un sourire amusé. Ce sourire se fit plus présent au fil du récit, quitte à devenir un véritable rire à la mauvaise blague de James ! Leur James, pas celui de 1976. Ce petit détail lui fit pourtant réaliser que certaines choses ne changeaient pas et ce peu importe l'époque : les James Potter restaient de vrais farceurs !

Ils parlèrent famille, amis et autres potins. Thomas se laissa porter par la discussion, se lançant dans d'interminables monologues sur le Quidditch, les rumeurs qui courraient dans les couloirs ou son avis sur la génialissime McGonagall du passé, tout en prenant gare à ne pas mentionner à nouveau leur mission. L'idée lui traversa plusieurs fois l'esprit, elle revenait comme un petit couteau pointu, appuyer régulièrement sur un coin douloureux de ses pensées, pour ne pas qu'il oublie. Il avait tant de questions sur ce qu'ils devaient faire, sur comment ils devaient le faire ! Il songeait à créer une sorte de club, officieux ou officiel, où ils pourraient se rassembler tous ensemble et faire le point. Ils devaient être soudés pour avancer... Ils avaient besoin de quelqu'un pour les guider.

Mais il n'en dit rien. Cette sortie était sous le signe de l'amusement. Elle servirait à lui - à leur ! - changer les idées et aucune de ces préoccupations morbides et stressantes ne devaient interférer dans cette belle journée.

Il avait faillit une fois à sa mission en confiant une fois le fond de sa pensée à Rose. Il ne voulait pas recommencer et lui plomber le moral. Thomas Dubois devait rester ce garçon souriant et toujours optimiste.

Il termina son verre en même temps qu'elle et le reposa sur la table quand elle évoqua leurs devoirs. Ah ! Par la barbe de Merlin, il avait oublié !

« Oh m'en parle pas ! J'ai trente centimètres de parchemin à faire en Histoire de la Magie, en plus ! Sur l'utilisation des baguettes magiques à travers les âges ! Si on avait le wifi et un Google Sorcier, ça irait tellement plus vite ! »

Tout en pestant, il glissa sa main dans ses poches pour chercher quelques piécettes et payer son dû. Rose fut plus rapide et le pris par surprise. Il l'observa un instant, puis jugea que son marché était correct.

« Très bien, la prochaine fois c'est moi qui invite ! » Il se releva avec elle et s'approcha de son amie d'enfance pour déposer un baiser bien bruyant sur sa joue. Un geste enfantin, affectueux, sans aucune arrière pensée. Il était encore loin d'y penser. « Merci à toi. »

Pour la journée. Pour être là.

Il ponctua sa phrase d'un tendre sourire, puis lui tendit le bras pour la raccompagner vers la sortie. Oui, le soleil se couchait à l'horizon, peignant le ciel de lueurs roses orangées. Il était temps de rentrer. Ils quittèrent les Trois Balais et prirent la direction du château, laissant encore un peu tout leurs tracas derrière eux.